À travers les âges.

Tu hésites une dernière fois avant d’emballer ta vieille peluche de chat roux pour ta nièce de cinq ans. L’impression de renoncer à quelque chose de précieux te tenaille. Bien sûr, ça fait au moins deux décennies que tu n’oses plus dormir avec des toutous, mais les garder dans ton placard te rassurait quand même. Une trousse de secours pour ton cœur d’enfant, au cas où la vie devienne trop sérieuse.

Tu te demandes si, aux yeux de ta nièce, tu es une de ces grandes personnes qui t’ennuyaient tant à son âge. Pourtant, tu te sens toi-même si peu adulte. C’est peut-être juste un costume que tu enfiles pour aller au travail ou demander un prêt bancaire.

Est-ce que tes parents aussi avaient ce sentiment d’imposture? Et leurs parents avant eux? Ou est-ce un luxe moderne de pouvoir prendre son temps pour grandir? Après tout, ils t’ont eu·e à l’âge où toi, tu peines encore à dire que tu es un·e adulte sans rire un peu.

C’est quoi, d’ailleurs, un·e adulte?

Si tu osais poser la question à tes grands-parents, auraient-ils des réponses?

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Comment notre rapport à notre identité et aux autres se transforme-t-il à travers les différentes étapes d’une vie? Quel regard pose-t-on sur notre famille à mesure que nous grandissons? Avec quel legs évolue-t-on? Qu’en faisons-nous? Quel sera le nôtre? Quelle sorte d’aîné·e serons-nous?

Dans un monde en perpétuel changement, difficile pour les diverses générations de se comprendre, de bâtir des ponts entre leurs réalités si contrastées; la tendance occidentale à mettre de côté les aîné·e·s n’arrange rien. Nous vivons dans une société terrifiée par l’idée du vieillissement. Les femmes deviennent invisibles passé un certain âge, la calvitie demeure taboue malgré qu’elle affecte une très grande proportion d’hommes, nous avançons en âge en redoutant de finir nos jours dans un CHSLD. Dans ces conditions, comment avoir envie de vieillir? Comment regarder l’avenir avec confiance?

Pourrait-on apprendre, collectivement, à retisser des liens bienveillants entre les générations au-delà de la transmission de recettes de famille? À l’échelle individuelle, comment arriver à se regarder vieillir avec sérénité tout en prenant soin de notre enfant intérieur?

Pour son sixième volume papier, la revue Saturne vous invite à réfléchir aux enjeux intergénérationnels et/ou à notre rapport identitaire au temps et au vieillissement, autant en tant que personne qu’en tant que société. Nous acceptons les nouvelles, les récits, les textes théâtraux, les poèmes, les essais, tout autant que les genres hybrides et novateurs. Saturne est également une revue de recherche-création, alors n’hésitez pas à envoyer des textes à la frontière entre réflexion et création.